L’ultra endurance
L’ultra-endurance se définit comme une activité physique soutenue pendant plus de 4h, et cela indépendamment du type de pratique (course à pied, vélo, natation, triathlon…) L’ultra endurance touche un public de plus en plus important.
L’exemple de la course à pied
Bien que les propos ci-dessous puissent êtres applicables à tous les types de pratiques sportives, nous parlerons ici de l’ultra endurance dans la course à pied. Cette thématique a souvent été abordée de manière pertinente dans les magazines spécialisés, que cela concerne la préparation, la performance et/ou le matériel. Aussi, nous vous proposons de traiter ce sujet, sous un angle complètement différent, à travers le regard de soignants et préparateurs physiques que nous sommes.
À l’issue des compétitions, il est courant de constater de nombreuses déceptions. Malgré une préparation soutenue, la construction d’un mental d’acier et un matériel adapté, certains athlètes échouent dans la quête de leur l’objectif. Lors des débriefings auxquels ils se livrent après la course, on s’aperçoit que les hypothèses de ces échecs sont nombreuses et parfois mal comprises. Nous évoquerons ici différents cas de figure d’abandon et les principales causes qui y sont associées. En laissant traîner ses oreilles à la fin d’un trail, on s’aperçoit qu’il existe plusieurs cas de figure d’abandon, nous simplifierons en distinguant les échecs, selon qu’ils interviennent en début ou en fin de parcours.
Les causes d’abandons précoces
La blessure
Pour ce qui est des abandons précoces – lors de la première heure de l’épreuve – une cause fréquente, à laquelle nul coureur n’est à l’abri, est la blessure. Qui, lors d’une course, n’a jamais vu un coureur blessé à moins de 2 km de la ligne de départ, avant que le peloton ne s’étire ? Le plus souvent, il s’agit d’une entorse de cheville, consécutive à un piège au sol qui n’a pas pu être anticipé. En effet, juste après que le départ ne soit donné, il s’écoule un long moment avant que chacun ne puisse courir à son rythme. Lors de cette cadence forcée, le coureur est rendu vulnérable par la suppression d’un de ses principaux sens : la vue. Le nombre de coureurs est parfois tel qu’il est difficile de regarder ses pieds lors des premiers kilomètres, on compte alors sur ce que l’on appelle la proprioception. Il s’agit de notre capacité à avoir conscience de la position et du mouvement de chacun des segments de notre corps et ce de manière inconsciente. Il parait donc intéressant lors de sa préparation et même avant de travailler ce point avant d’intégrer des exercices préventifs lors des séances d’entrainement. Autant une entorse est souvent le fait de la malchance, autant une lésion musculaire en début de parcours (déchirure musculaire ) est le plus souvent le fruit d’un mauvais échauffement ou d’une mauvaise préparation. L’échauffement a pour but d’améliorer les capacités visco élastiques du muscle et doit permettre une amélioration de la souplesse, du rendement et de résistance à l’étirement. Ce point est souvent négligé, à tort. Il faut insister sur un départ progressif de la course, quelle que soit la course et surtout lorsqu’il fait froid ou lorsque le terrain est gras (sollicitant d’autant plus force et souplesse des membres inférieurs) il est important de ne pas sauter l’étape de l’échauffement.
Un état de forme incompatible
Une autre cause d’abandon précoce vient du fait que le sportif s’aligne sur une course, alors que son état de santé n’est pas compatible avec les exigences de l’épreuve. Il peut s’agir d’une blessure négligée apparue lors de la préparation ou pour laquelle le temps de cicatrisation n’a pas été respecté. Cette sous-estimation de la lésion est responsable d’un abandon prématuré, mais elle s’accompagne surtout d’un allongement du temps de convalescence et d’une augmentation du nombre de forfaits pour les épreuves à suivre. Il est important pour un athlète de savoir manquer une course, de tenir compte de son état et de sa forme pour s’éviter une saison sportive écourtée par des blessures traînantes ou trop fréquentes.
Les abandons en 2ème partie de course
Il est fréquent d’entendre des coureurs expliquer leur bon ressenti sur la première partie, suivi d’une méforme subite ou d’une douleur responsable d’un arrêt de l’effort. Parmi ces échecs, un bon nombre est imputable à une préparation physique inadaptée au type d’épreuve ou à l’état de forme du moment. En effet, les programmes de préparation sont souvent composés d’un nombre conséquent de sorties hebdomadaires, organisées autour de temps de récupération. Ces surcharges de travail soigneusement structurées exploitent différents mécanismes nécessaires à la progression tels que la surcompensation et l’adaptation cardiaque à l’effort. Un juste équilibre entre sorties en endurance fondamentale, exploitation de la VMA et travail spécifique doit permettre de développer une fonction cardiaque optimale permettant une augmentation importante des fréquences cardiaques lors de passages d’obstacle et en parallèle développer une musculature à même de franchir aisément chaque obstacle, sans mettre à mal les capacités de l’organisme. Tous les programmes proposés ne se valent pas et ne conviendront pas forcément à chacun. Il faut savoir prendre en compte les contraintes d’emploi du temps ainsi que la rapidité de son organisme à se remettre d’un effort, lors du choix du programme de préparation. Il faut aussi rester à l’écoute de son corps et savoir faire l’impasse sur certaines sorties en cas de fatigue importante.
La tendinopathie
Un autre paramètre intervenant dans l’échec lors d’une épreuve, c’est la blessure et plus particulièrement la tendinopathie. Ce type de lésions, hantise du sportif, trouve son origine dans la sur-sollicitation du tendon concerné. En effet, le travail musculaire intense induit des tensions importantes qui fragiliseront un tendon mal préparé. On retrouve en effet des modifications de la composition du tendon au microscope, suivie par une phase inflammatoire dont les douleurs peuvent rendre la pratique sportive insoutenable. Les symptômes peuvent être d’expression variable, il faut simplement savoir que ce genre de pathologie peut être prévenu par un renforcement excentrique de certains groupes musculaires qu’il faut inclure dans la préparation. Ce point est particulièrement vrai pour les tendons des ischio jambiers et le tendon d’Achille. De plus il ne faut pas oublier de veiller à supprimer certains facteurs favorisants tels que les problèmes de chaussage, hydratation, alimentation.
Les pathologies des pieds
Parmi les athlètes qui abandonnent pour cause de douleurs, bon nombre souffrent de pathologies au niveau des pieds. Ces pathologies très (trop) fréquentessont souvent liées à des problèmes de matériel. À elles seules, elles peuvent transformer radicalement le vécu que l’athlète aura de son épreuve. Il est donc primordial d’attacher beaucoup d’importance au choix de son matériel, sans oublier la prise en charge de tous les petits «bobos» dont nos pieds peuvent souffrir, en prenant avis auprès d’un médecin ou d’un podologue.
S’alimenter & s’hydrater
Point capital, l’alimentation et l’hydratation : passé 2h d’épreuve, une consommation d’eau est indispensable.
HYDRATATION : La manière de s’hydrater par petite quantité est souvent bien intégrée par les sportifs. Nous insisterons simplement ici sur le fait qu’une baisse des performances sportives peut être le simple fait d’une déshydratation modérée. En effet lors qu’apparaît la sensation de soif, le rendement musculaire et les performances mentales chutent d’environ 10%.
ALIMENTATION : En parallèle, l’apport de nutriments est indispensable pendant ce type d’épreuve. Différents mécanismes participent à rendre l’alimentation difficile durant l’effort, tels que la diminution du flux sanguin à destination du tube digestif, les vibrations et la diminution de l’apport d’oxygène. Ces facteurs rendent l’apport de carburant pour l’organisme difficile et sont de fait responsables de situations variées allant de la simple baisse des performances à l’hypoglycémie vraie avec impossibilité de poursuivre, voire la nécessité de recourir à des secours. Savoir profiter des sorties longues de préparation pour apprendre à s’alimenter pendant l’effort et trouver le régime qui vous convient reste le meilleur allié.
Le surentraînement
Outre l’aspect psychologique, les problèmes de matériel et les conditions météorologiques auxquelles certains coureurs ne sont pas habitués, il existe un phénomène méconnu qui participe à certaines contre-performances, il s’agit du syndrome de sur entraînement. Le sur entraînement se définit par un état de fatigue physique et psychologique lié à une surcharge de travail physique dépassant les capacités de régénération de l’organisme. Les symptômes sont divers mais associent de manière constante une diminution des performances. C’est la conséquence de préparations trop contraignantes avec des temps de repos insuffisants. La meilleure prévention de ce problème reste une planification adaptée et rationnelle prenant en compte les contraintes familiales et professionnelles, associée à un calendrier des compétitions comprenant un temps de repos de plusieurs semaines entre 2 préparations.
En conclusion
L’ultra endurance est une spécialité qui se démocratise, qui n’en reste pas moins très exigeante sur les plans physique et psychologique. Une bonne connaissance des pièges à éviter lors de la pratique ou de la préparation et de quelques règles simples à respecter, devrait permettre une pratique sereine de cette activité.
Dr Mehdi Roudesli, IRMSHN Christophe Terzi, préparateur physique